C’est la mission principale des structures comme Archaos. Les accueils de jours sont « des lieux d’accueil inconditionnel et de mise à l’abri en journée, qui favorisent le lien social », stipule en effet la charte mise en place il y a quelques semaines entre les sept dispositifs du genre que comptent le Var et la Direction départementale de l’emploi, du travail, et des solidarités.

Se remplir l’estomac et le cœur

« Cette charte permet un socle de travail commun entre nous tous, explique Marianne Santoni, la présidente d’Archaos, tout en reconnaissant les spécificités de chaque structure. Elle montre aussi l’intérêt que nous porte le préfet. » Il faut dire, ajoute Jean-Paul Jambon, trésorier adjoint de l’association et délégué de la Fondation pour le logement (ex-Fondation Abbé-Pierre), soutien financier, que « nous sommes quasiment une délégation de service public ! ».

Et la charte ne le détrompe pas vraiment, qualifiant ces structures de « premier contact des personnes en situation de précarité ». Car au-delà d’un accueil et d’une écoute, ces dispositifs pourvoient à des besoins de première nécessité : s’hydrater, se chauffer, se laver… « Des lieux pour se reposer de la rue », résume la présidente.

« Je trouve ici du réconfort », confirme Isabelle, une quinqua qui vit « plus ou moins dehors » depuis qu’un accident l’a jetée dans la rue, handicapée et totalement démunie.

À la table de Manu, Michelle, elle, a un toit. Mais pas d’eau chaude. Pas de chauffage. Alors chaque jour depuis deux ans, elle vient se remplir l’estomac et le cœur aux côtés de « gens qui sont comme [elle] et qui [la] comprennent ».

Premiers pas dans la société


Photos Camille Dodet.

Les équipes – Archaos compte dix éducateurs spécialisés et animateurs, ainsi que l’aide précieuse de jeunes en service civique – ont aussi pour vocation de favoriser l’accès au droit d’un public qui y a peu recours. « Nous travaillons sur les parcours sociaux », souligne Marianne Santoni. Les personnes accueillies sont ainsi guidées dans leurs démarches pour mettre en place un accompagnement.

Accès aux soins, notamment en cas d’addiction ou de troubles psychologiques, à un hébergement puis au logement, et pourquoi pas à l’insertion professionnelle… Autant d’étapes pour les aider à (re)faire « leurs premiers pas dans la société ».

Parfois, jusqu’à renouer avec elle. Steve, visage fendu par un immense sourire, participe moins souvent au repas d’Archaos. Il vient parfois parce que « c’est sympa », mais il a désormais un travail et, dans quelques jours, il entrera dans son propre appartement. « C’est grâce à Archaos que je n’ai pas sombré dans la dépression ! »

Un donné pour un rendu

Une gratitude dont certains témoignent en se mettant à leur tour au service de leurs pairs. Malik et Jean-Luc, tous deux en costume cravate, chapeau vissé sur la tête, sont aujourd’hui « délégués » : ils font le lien entre les accueillis et l’association.

« J’ai été dans la rue pendant quinze ans, confie le premier, un plateau de tarte aux pommes en main. Je m’en suis sorti grâce à Archaos. Aujourd’hui, j’ai une femme et deux enfants, une activité de technicien informatique à domicile. C’est à mon tour de donner. » « En 2018, j’étais à la rue, explique en écho Jean-Luc, attablé avec Raymone et Laetitia. C’est l’association qui m’a permis de m’en sortir. Maintenant, je rends l’amour que j’ai reçu. » Il ajoute : « ça me fait plaisir de voir des accueillis qui commencent à s’en sortir ! »

Mais la société se fait de plus en plus dure pour les plus démunis. « Ici, note Nathalie Germain, la cheffe de service d’Archaos, on accueille maintenant 30 % de personnes qui, bien qu’elles aient un logement, sont dans une très grande précarité. » Elle remarque aussi un public de plus en plus jeune et souffrant de pathologies psychologiques lourdes, liées ou non à de l’addiction. Des facteurs qui demandent de l’adaptation aux associations. Car, coûte que coûte, leur mission demeure « l’accueil inconditionnel, tout en permettant la paix, dans et hors des structures ».

Dans le Var, les services de la préfecture estiment à 4 000 le nombre de personnes sans domicile fixe. Plus des deux tiers seraient sur le secteur toulonnais.